vendredi 4 octobre 2024

Le latin dans les écoles européennes

 

L’enseignement des Langues et Cultures de l’Antiquité, et plus particulièrement celui du latin, est au cœur de la réflexion didactique au sein des Ecoles européennes ; s’y pose, comme ailleurs, la question de sa transmission : elle ne peut en effet être indifférente à notre humanité.


Nous nous efforçons de donner à cette discipline toute sa place dans le cursus scolaire, quel que soit le parcours retenu, quelle que soit l’orientation choisie, en raison de sa vocation véritablement généraliste.


Cette langue met à notre disposition un savoir littéraire, philosophique et historique qui nous aide à mieux appréhender notre monde actuel grâce au détour par l’Antiquité, ce sont des références, des substrats profonds, voire des modèles pour comprendre le monde d’aujourd’hui.

Le latin et le grec participent avec les autres langues étrangères, mais à leur façon, au développement des compétences-clés.


1. La communication dans la langue maternelle

L’enseignement du latin offre aux élèves une occasion irremplaçable d’appréhender le fonctionnement de leur propre langue maternelle : les allers et retours entre langue latine et langue maternelle, selon les modes de traduction divers, en renforcent et en approfondissent les bases (lexique, syntaxe), ouvrant à une maîtrise plus solide de la langue maternelle.

 

2. La communication en langues étrangères

L’enseignement du latin a vocation à servir d’auxiliaire très précieux et efficace pour apprendre les langues 3 et 4 et pour développer avec méthode les compétences langagières de la langue 2 (lexique, général ou spécialisé, syntaxe).

 

3. La compétence mathématique et les compétences de base en sciences et technologies

L’enseignement du latin, langue à déclinaisons, ayant une syntaxe à la fois rigoureuse et libre, met en permanence l’élève dans des situations d’analyse exigeant vigilance et rigueur : il doit formuler des hypothèses d’analyse, construire ou inventer des rapports justes entre des éléments éloignés dans la phrase. A côté du grec, le latin éclaire l’ensemble du vocabulaire scientifique, en particulier celui de la médecine, et l’origine d’un certain nombre de sciences.


4. La compétence numérique

L’enseignement du latin, qui s’est profondément renouvelé, fait appel désormais aux nouvelles technologies pour apprendre différemment la langue, conserver des informations, savoir choisir les plus pertinentes, produire des textes et des documents, individuellement ou en groupe.

 

5. Apprendre à apprendre

Parce que le latin n’est plus prioritairement une langue de communication orale, cette singularité permet de ce fait un rapport plus réfléchi et plus distancié à la langue: le latin exige une attention rigoureuse aux mots dans toutes leurs dimensions, aux tournures et à leur signification. Il est une éducation efficace à la précision.

Parce que le rapport à la langue latine est singulier, son enseignement offre des situations pédagogiques qui forment une éducation à l’inventivité et l’autonomie.

L’enseignement du latin conduit à une approche en permanence transversale par la mobilisation de plusieurs disciplines en même temps : étant pluridisciplinaire par nature, le cours de latin fait appel à la langue, à la littérature, à l’histoire, à la philosophie. Ainsi, les connaissances et les compétences que développe la langue latine, sont transférables à d’autres disciplines.


6. Les compétences sociales et civiques

L’enseignement du latin permet de mieux comprendre les mondes d’aujourd’hui : il apporte des éclairages irremplaçables, il met en regard nos sociétés et celles du monde antique, il fournit des clés pour l’économie, le droit, la religion, la vie politique et sociale.

L’Europe actuelle entretient des rapports à la fois d’identité et d’altérité avec le monde romain : le latin contribue ainsi à développer le sens de la différence et de l’identité dans la vie collective, dans une société de plus en plus complexe.

Une telle connaissance habitue l’élève à mieux cerner les grandes tensions de notre monde : en effet, le détour par l’Antiquité lui permet de mettre le présent en perspective, de le relativiser, de se libérer de la tyrannie de l’immédiat. C’est une éducation à l’esprit critique.

Il est un facteur de tolérance, puisqu’il apporte une connaissance approfondie des différentes formes de société et de religion.

 

7. L´esprit d´initiative et d´entreprise

Suivre l’enseignement du latin est le signe d’une démarche originale, signe d’autonomie et d’indépendance, par-delà les phénomènes de mode et de conformisme, loin d’une conception utilitariste de l’éducation.


8. La sensibilité et l´expression culturelles

Pour les Ecoles Européennes en particulier, le latin comme le grec, est spécifiquement une langue internationale de culture : il favorise singulièrement la perception des convergences et la comparaison avec les cultures  de l’Europe; il invite les élèves à explorer des textes fondateurs qui ont nourri et nourrissent encore la culture, l’imaginaire et les arts en Europe et dans le monde, hier comme aujourd’hui.

Au-delà de l´appropriation du patrimoine, les élèves latinistes sont conduits à exercer leur sensibilité à travers le théâtre et d’autres formes artistiques (arts plastiques, céramique, cinéma, bandes dessinées …).



Les L.C.A. renforcent les compétences linguistiques, langagières et culturelles en synergie avec la langue maternelle et les langues étrangères. Elles trouvent toute leur place dans un pôle linguistique élargi.



Par delà les préjugés tenaces concernant les langues et cultures de l’Antiquité, nous sommes persuadés qu’elles favorisent un développement intellectuel pluridisciplinaire et contribuent réellement, au-delà des propos convenus, à construire une culture européenne, consciente de ses racines, comme tant d’artistes et de penseurs le montrent quotidiennement.


Dominique Willé

IA IPR de Lettres
Académie de Strasbourg
Chargé de mission auprès des Ecoles européennes