2.4 Journal de lecture et lecture d’une œuvre intégrale
Une fois que les élèves ont débuté leur journal de lecture, on peut peu à peu l’utiliser dans le cadre d’une lecture plus longue.
Nous avons expérimenté plusieurs stratégies.
Fixer des étapes dans la lecture de l’œuvre
Nous avons souvent demandé aux élèves la rédaction de plusieurs entrées, laissant un degré d’autonomie plus ou moins important.
Nicolas Bannier a demandé une entrée pour chaque acte de Dom Juan. Gaelle Macuba a demandé de compléter le journal à la lecture de la moitié et de la fin de Petit pays, Wendolin Bach a étudié Roméo et Juiette avec ses élèves de 3ème, plus particulièrement les scènes classiques : le prologue ; la scène d’exposition ; la rencontre lors du bal ; la scène du jardin et les suicides.
Pour chacune de ces scènes, les élèves devaient remplir deux ou trois entrées du Journal de Lecture (prédire / se questionner etc.) après leur lecture personnelle / le visionnage d’un extrait. Wendolin Bach
Pour l’étude d’une autres œuvre, celui-ci a demandé trois entrées différentes : à l’issue du 1er chapitre, un chapitre au choix, à la fin de l’œuvre.
Au cours de la lecture intégrale d’une œuvre, le journal de lecture permet à l’enseignant d’accéder aux impressions de lecture des élèves : Gaëlle Macuba repère ainsi lors de la première session, à la moitié du livre des fausses pistes intéressantes et des remarques sincères :
L’élève ci-dessus n’imagine pas que le récit va se poursuivre au Burundi : pour lui, la situation est suffisamment tendue pour justifier le départ de l’enfant-narrateur. De plus, il confond le prénom du personnage (Gabriel) et de l’auteur (Gaël) ce qui a permis de discuter des raisons de cette confusion.
L’élève ci-dessus rend compte d’un temps d’échange en début de cours sur l’avancée de la lecture. A partir d’un sentiment mitigé sur le début du roman, la classe s’était interrogée sur les raisons de ce sentiment de longueur. Cela a permis un travail sur la narratologie et sur les fonctions de la description.
On le voit, en plus de soutenir la motivation des élèves dans leur lecture de l’œuvre, le carnet de lecture permet des allers-retours entre le journal et l’étude en classe de l’œuvre intégrale.
Le travail réalisé par Wendolin Bach en classe de 3ème en témoigne également. Un élève avait par exemple écrit pour la scène de la rencontre :
« Dans le passage où Roméo et Juliette se rencontrent il y a un champ lexicale de la religion «Bon pèlerin » «Sainte,Saint». »
ou encore pour la scène du balcon :
Quand Roméo était en train d’écouter Juliette parlant toute seule au balcon il a entendu Juliette se plaindre qu’il soit un Montaigu et qu’elle aurait donc voulu qu’il soit n’importe quel autre nom. Ce qui conduit Roméo à une sorte d’engagement sans le dire de façon claire qu’il s’opposerait par amour pour Juliette à sa famille et à la société de Vérone.
Ces entrées lui ont permis de susciter et d’enrichir la construction des analyses en classe.
Des allers-retours entre le journal et l’étude de l’œuvre intégrale : un exemple en 6ème
Julie Castel a utilisé le journal de lecture dans le cadre de l’étude de la nouvelle « Mondo » de Le Clézio en classe de 6ème.
Après avoir présenté le journal de lecture, le cours s’est déroulé sur 4 étapes, permettant des allers-retours entre le journal de lecture et l’étude de l’œuvre.
1. Première étape
Comme mentionné précédemment, Julie Castel a débuté par la lecture de l’incipit de la nouvelle en classe : elle a demandé aux élèves de compléter les fiches “Prédire” et “Se questionner” du journal de lecture.
Il est apparu :
-
que les élèves de sixième ont des difficultés à s’appuyer explicitement sur des passages de l’œuvre pour justifier leurs remarques.
-
que certains ont aussi des difficultés à repérer le sens programmé par le texte (le héros ne sait pas lire, il a très peur de Ciapacan, il considère la ville comme un espace de jeu).
Cependant, le jeu des prédictions et des questions a motivé les élèves à lire la suite de la nouvelle : le héros sera-t-il adopté ? Apprendra-t-il à lire ? Pourquoi vit-il seul ?
Deuxième étape : lecture intégrale de la nouvelle par les élèves.
Les élèves pouvaient prendre des notes sur un marque-page papier (le livre étant prêté par l’établissement, les notes ne pouvaient se faire directement sur le livre).
Les résultats du contrôle de lecture ont montré que la nouvelle avait été lue par 23 élèves sur 25, mais que certains passages n’avaient pas été compris. Le retour au Journal de lecture a permis par la suite d’améliorer la compréhension de l’œuvre.
Troisième étape : retour au Journal de lecture
L’enseignant a demandé aux élèves de compléter trois des entrées du Journal au choix parmi les suivantes: VISUALISER, FAIRE DES LIENS, DÉCOUVRIR, RESSENTIR, JUGER pour favoriser encore l’appropriation de l’œuvre. En plus de l’AIDE proposée dans le Journal, les élèves qui avaient tardé à faire ce travail ont été guidés par des questions supplémentaires :
VISUALISER : Que ferai-je avec Mondo si nous nous rencontrions?
FAIRE DES LIENS: Que fait Pascalet lors de sa fugue? Quel est son rapport avec la nature? (BOSCO, L’Enfant et la rivière, lecture cursive préalable à l’étude de Mondo).
Certaines fiches ont pu être actualisées au fur et à mesure de l’étude de passages choisis en classe.
Quatrième étape : préparation de l’expression écrite.
Les élèves ont enfin traité le sujet suivant :
Vous rencontrez Mondo et il partage quelques heures de sa nouvelle vie avec vous. Racontez la rencontre dans un récit au passé. Aidez-vous des synthèses des séances de la séquence ainsi que des fiches du Journal de lecteur.
Pour plus de pistes sur les liens entre écrits d’appropriation et journal de lecture, vous pouvez consulter cet article. [Lien vers Focus écriture]